PRESENTATION GENERALE

Les oreilles sont très souvent atteintes lors d’un accident de voiture, lors d’une brûlure, après une tumeur, d’une infection ou encore après morsure lors d’une rixe. On peut aussi y inclure les malformations d’oreille congénitales déjà opérées de multiples fois : en effet elle pose les mêmes problèmes de cicatrices multiples et de manque de peau.

L’importance de la perte de substance de l’oreille est très variable. Elle emporte le cartilage et la peau.

Il peut s’agir d’un manque au niveau du bord de l’oreille, sur l’hélix ou encore sur le lobule. Mais toute l’oreille peut être atteinte ainsi que la peau aux alentours lors d’une brûlure par exemple.

Par contre le conduit auditif est généralement respecté ainsi que le tragus.

Le principe général est de reconstruire les volumes de l’oreille grâce à du cartilage qui sera  recouvert de peau.

Il y a généralement 2 temps opératoires :

Un 1°temps qui consiste à reconstruire la forme de l’oreille grâce à du cartilage et en le recouvrant cette sculpture de cartilage par de la peau.

Un 2e temps opératoire entre 6 mois et un an après le 1° temps qui va permettre de décoller l’oreille et de recréer le sillon rétro-auriculaire.

LE PREMIER TEMPS OPERATOIRE

La reconstruction du cartilage :

Pour des petites pertes de substance inférieure 2 cm du bord libre de l’oreille, on peut utiliser le cartilage de la conque (la partie profonde de l’oreille) de l’autre oreille. Dans ce cas il existe simplement une cicatrice derrière l’autre oreille et un pansement sur cette oreille pendant 8 jours. Rien ne sera visible au niveau de celle-ci.

Lorsque la perte de substance est plus importante il faut avoir plus de cartilage et nous allons le chercher au niveau des côtes où il est très abondant. Suivant l’importance il sera prélevé le cartilage costal des cinquièmes sixièmes et septièmes côtes. Cela laisse une cicatrice de 6 cm environ au niveau du thorax, sans déformation ni gêne quelconque après le temps postopératoire qui peut être douloureux.

Le cartilage ayant une tendance à s’ossifier avec l’âge, nous réalisons avant l’intervention un scanner avec une reconstruction 3D qui nous permet de voir si ce cartilage n’est pas trop ossifiée s’il est utilisable.

Avec ce cartilage est réalisé une sculpture qui reproduit les formes de l’oreille.

La reconstruction de la peau :

Pour recouvrir la sculpture de cartilage, il faut de la peau qui soit suffisamment bien vascularisée et fine afin de pouvoir mouler tous les reliefs de l’oreille sans risquer de nécrose.

Après un traumatisme, il manque souvent une grande quantité de peau, qu’elle ait été coupée, brûlée ou infectée.

D’autre part il existe souvent des cicatrices importantes. Ces cicatrices, là encore, gênent la bonne vascularisation de la peau.

Dans certaines circonstances il est possible d’utiliser la peau locale sans prendre de risques, mais très souvent il va falloir apporter autre chose pour recouvrir le cartilage:

Le lambeau temporal superficiel

Sous la peau de la tempe, il existe une petite artère appelée artère temporale superficielle qui vascularise une petite feuille de tissu le lambeau temporal superficiel qui est fin, bien vascularisé et peut être retourné pour couvrir le cartilage. Ce lambeau temporal superficiel sera capable d’épouser les reliefs du cartilage sans nécroser et ainsi permettre de compléter la peau locale existante. Ce lambeau doit être couvert lui-même par une greffe de peau, que l’on prend au niveau du cuir chevelu en mode « semi épaisse » et qui va permettre d’une part de recouvrir le lambeau avec une peau de la bonne coloration( et sans cheveux), mais aussi de ne laisser aucune cicatrice visible sur le cuir chevelu, les cheveux repoussant immédiatement. Pour cela il faut bien sûr que l’artère n’ait pas été blessée lors du traumatisme, ce qui est vérifié par un examen Doppler lors de la consultation. Ce lambeau temporal superficiel est très sur dans des mains expérimentées . Cela rallonge cependant considérablement le temps opératoire d’une reconstruction d’oreille premier temps puisque dans ce cas de figure l’intervention dure généralement aux alentours de 7 h.

Cela n’entraîne pas de douleurs supplémentaires au niveau du cuir chevelu, mais il y a bien sûr la douleur au niveau du prélèvement du cartilage costal qui est relativement aigu pendant les 3 premiers jours, période où le patient est à la clinique où l’on peut au mieux la traiter.

La durée d’hospitalisation est donc de 3 à 4 jours. Et les suites opératoires avec des soins journaliers durs environ 3 semaines après la sortie. Si la greffe que l’on a mise sur le lambeau de fascia a correctement pris, la durée de séjour à Paris durant 8 jours après la sortie de clinique, soit environ 2 semaines au total. Les soins seront ensuite effectués tous les 2 jours, avec un contrôle par mes soins en m’envoyant directement des photos ou des vidéos WhatsApp. Le temps d’évolution d’un lambeau de fascia temporal est long : il est gonflé au départ ce qui cache les reliefs du cartilage sous adjacents et nécessitent souvent de 6 mois à un an d’évolution avant d’obtenir le résultat final.

Lors ce qu’un fascia a été utilisé, le 2e temps opératoire qui vise à recréer le sillon rétro-auriculaire a lieu un an après le premier temps opératoire et non pas 6 mois comme à l’habitude.

LE DEUXIEME TEMPS OPERATOIRE : LA CREATION DU SILLON RETRO-AURICULAIRE

À la fin de la première intervention l’oreille est donc collée soit complètement soit en laissant le lobule libre. Après 6 mois ( 1 an après un fscia temporal)on peut décoller l’oreille et recréer le sillon.

Pour cela on va inciser autour de l’oreille et la soulever. On va faire glisser la peau du cou vers le haut pour recouvrir la région qui est derrière l’oreille, sur le crâne. La zone derrière le pavillon de l’oreille est recouverte par une greffe de peau prélevée au niveau du cuir chevelu. Prendre la greffe à cet endroit a l’intérêt de ne laisser aucune cicatrice visible, les cheveux repoussent sans aucun problème au niveau de cette zone qui cicatrise en quelques jours. La peau qui va être utilisée pour recouvrir la face postérieure du pavillon de l’oreille sera de la bonne couleur (penser à une personne chauve chez qui la couleur de la peau est la même sur le crâne que sur l’oreille) et bien sûr ne présente pas de cheveux.

Déroulement d’intervention : cette intervention se passe sous anesthésie générale et dure environ 2h30. Une hospitalisation de 24 h seulement est nécessaire, le pansement n’est pas touché jusqu’à la consultation suivante, une semaine après environ. Des soins seront alors nécessaires par une infirmière tous les 2 jours environ, et là aussi je préfère que les patients m’envoient des photos et des vidéos très régulièrement sur WhatsApp. D’ailleurs je demande en général aux parents de faire une vidéo pendant que je fais premier pansement.

ASPECTS PARTICULIERS EN FONCTION DES DIFFERENTES CAUSES

Après brûlures : la cicatrisation met longtemps à se stabiliser et il faut souvent plus d’un an avant de commencer la reconstruction. La perte de substance intéresse en premier lieu la partie de l’oreille la plus exposée c’est-à-dire celle qui est décollée (hélix, anthélix) en préservant souvent la conque, le conduit auditif externe et le tragus. La peau rétro-auriculaire est souvent atteinte, ainsi que le cuir chevelu. Cette peau brûlée est très peu extensible, il va donc souvent falloir avoir recours à un lambeau de fascia temporal. Malgré la brûlure au 3edegré l’artère reste souvent perméable et utilisable. Il faut bien sûr la repérer par Doppler en consultation. Dans ces conditions l’intervention donne des résultats très satisfaisants. Même si elle n’est pas utilisable , la reconstruction reste possible.

Après amputation traumatique : la section est souvent franche, et la peau restante utilisable. Il faut cependant qu’elle soit en quantité suffisante, il peut être nécessaire de réaliser là aussi un lambeau de fascia temporale. Si le traumatisme sectionnait l’artère temporale superficielle, notamment lors d’un accident de voiture, il sera possible de réaliser une expansion de la peau pour permettre la reconstruction. L’expansion peut permettre aussi de traiter l’alopécie ( zone où les cheveux ne poussent pas)

Après infection : la situation la plus habituelle est celle d’une complication après un piercing effectué au travers du cartilage qui a entraîné une infection du cartilage qui s’est rétracté. Cette infection peut être plus ou moins localisée, mais en général la peau qui s’est rétractée n’est pas réutilisable.

Cependant la peau restante généralement en quantité suffisante, il est très rare d’avoir recours un lambeau de fascia temporal superficiel.

Après tumeur : en cas de tumeur il faut obtenir des médecins qui sont en charge du traitement l’autorisation de commencer la reconstruction, car ils peuvent craindre une récidive locale.

Les sections cutanées sont généralement franches, et la peau restante de bonne qualité. Il est cependant fréquent d’avoir besoin d’avoir recours à un lambeau temporal superficiel.

Les malformations d’oreille congénitale opérées de multiples fois : la présence de cicatrices multiples, la nécessité en général de remplacer complètement le cartilage nous metteent dans une situation très proche d’une reconstruction d’oreille post-traumatique, avec notamment la nécessité d’utiliser un lambeau de fascia temporal superficiel.